Le monde du gamelan
Danse && répertoires

Danse indienne

Indian dance

  1. Ce qu'est la danse indienne
  2. Caractéristiques de la danse indienne

Ce qu'est la danse indienne

Il est important de clarifier ce que, dans ce site Web, “danse indienne” signifie. Cette expression de deux mots a différentes acceptions dans différents livres ou travaux. Elle est le plus souvent associée aux (soit-disant) danses classiques comme le kathak et le bharata natyam.

Mais pour ce site Web nous avons besoin d'un portrait plus précis pour correspondre à cette expression. Et elle le mérite de toute façon. Premièrement, elle ne se s'applique pas aux danses de l'Inde dans leur totalité, mais seulement à certaines d'entre elles. Deuxièmement, son étendue géographique ne se limite pas à l'entité politique de l'Inde ni même au sous-continent indien.

1. Pas toutes les danses de l'Inde

Le sous-continent connaît beaucoup de différentes traditions de danse, certaines sont d'origine indigène, d'autres montrent une influence étrangère plus ou moins évidente. Parmi les traditions indigènes, il y a :

  1. Danses sacrées, souvent liées au temple, partageant une esthétique commune et ayant une technique sophistiquée.
  2. Danses tribales. Elles ont parfois une fonction rituelle, comme les danses du numéro 1.

Les danses d'origine étrangères, ou trahissant de fortes contributions étrangères dans leurs fondations, comprennent :

  1. Les créations modernes d'influence occidentale de la société urbanisée.
  2. Le grand corpus de formes folkloriques d'inspiration moyen-orientale trouvées principalement dans les régions nord-ouest.
  3. Des formes de danse, telles que le kathak, provenant des cours mogholes ont des origines mélangées. Elles dérivent partiellement de la tradition du temple Indien mais sera considéré avec précautions puisque leur technique et contexte doivent aussi beaucoup à la culture moyen-orientale.
  4. La danse qui est utilisée dans les films commerciaux comme les productions Bollywood. Ce style de danse dérive lui-même des trois traditions précédentes 3, 4 et 5.

Nous ne devrions faire aucune confusion entre ce que nous nommons danse indienne et ces quatre sortes de danse. Les danses 3, 4 et 6 ne sont d'aucune pertinence dans le propos qui nous occupe. La danse 5 peut parfois prendre des formes intéressantes selon le contexte, le style, l'artiste. Cela est dû à son arrière-plan hindou.

C'est dans les danses de la première catégorie (1) que réside la matière qui nous intéresse. Ces danses peuvent avoir diverses formes et existent dans des lieux épars du sous-continent indien, du Népal au Sri Lanka. C'est dans la partie méridionale du sous-continent que cette tradition est la mieux représentée aujourd'hui. Il faut garder à l'esprit, toutefois, que ce serait trop simple de retenir cette catégorie comme notre danse indienne. Une raison est sa situation actuelle. Elle a subit un grand déclin dans l'ensemble du sous-continent. Au travers d'un processus d'acculturation, son rapport avec l'organisation sociale et rituelle indienne a diminué pendant que les danses mogholes et folkloriques étaient en train de devenir la norme. Les danses de temple prenaient un rôle moins important dans la culture indienne. Elles devenaient moins prédominantes. La colonisation britannique se contenta d'achever la tradition de temple. Les déwadasi, ces danseuses au service du rituel de temple, ne pouvaient plus remplir leur fonction sacrée. C'était une grande perte pour les danses de temple. Il y a eu un renouveau, mais souvent artificiel et mené par une volonté extérieure, ne venant pas de la vitalité spontanée de la tradition. La plupart des danses aujourd'hui sont exécutées HORS CONTEXTE : elles ne se font pas dans le temple (le lieu d'où elles sont venues), elles servent plus souvent un but académique qu'un but rituel, l'auditoire est occidentalisé bien qu'il puisse ne contenir que des Indiens. Une fois décontextualisée, la danse peut facilement être trempée dans l'esthétique moghole (surtout la musique et le costume) avant d'être exportée et adaptée aux formes académique, intellectuelle ou de concert.

En parlant de ces reconstructions, les noms auxquels nous sommes le plus habitués comprennent bharata natyam, odissi, kathakali. Quoique de tels noms peuvent être utiles en donnant des indications dans quelle région de l'Inde on se situe, ce sont des dénominations simplifiées et artificielles. Comparées à la longue durée de la tradition de la danse indienne, ces dénominations sont relativement récentes bien qu'elles prétendent définir les “danses standard de l'Inde”. Elles reflètent une approche académique européenne de l'art, une approche dans laquelle la danse indienne devient une expression classique. Pour être plus précis : en Inde, classique veut dire mort et fossilisé.

Il y a, en revanche, des traditions de danse ininterrompues qui ont “survécu” le déclin general. Un exemple est le théâtre kudiyattam du Kérala. Il ne se fait pas connaître au public parce que son contexte n'est pas la salle de récital mais les temples de village. Il est destiné au rituel et à un auditoire de passage ou insouciant. Le kathakali est une dérivation récente du kudiyattam. Le bharata natyam lui-même est derivé du dési-attam. Le kudiyattam et le dési-attam entrent dans l'éntendue de notre “danse indienne”. Le kathakali et le bharata natyam peuvent aussi avoir un intérêt quand ils prennent vraiment des formes et qualité authentiques. La danse de temple du Sri Lanka a la même origine que le bharata natyam mais a mieux gardé la qualité de la danse originelle. Le Népal maintient aussi une forme intéressante de danse. On voit déjà que “danse indienne” contient non pas les quelques six étiquettes stéréotypées mais leurs sources à partir desquelles elles ont été ranimées ou reconstruites. Il est significatif que le Népal et le Sri Lanka sont aux deux extrémités du sous-continent indien.

2. Étendue géographique

Si on discerne des signes d'esthétiques indiennes dans beaucoup de danses de l'Asie, c'est particulièrement dans le sud-est asiatique qu'on voit une influence concrète, et ce sont les danses khmère et javanaise qui montrent une esthétique et une technique qui sont vraiment indiennes.

Nous manquerions d'importantes formes de danse sans considérer ces danses khmère et javanaise, et la balinaise. Si elles sont dérivées de celles de l'Inde, elles sont aussi les seules descendantes existantes de formes qui ont disparues en Inde. Elles pourraient aussi être des re-créations de formes jamais connues en Inde mais basées sur les mêmes principes, esthétique et contexte que ceux en Inde. Cela signifie qu'une forme de danse indienne peut prendre naissance à l'extérieur de l'Inde.

Nous manquerions beaucoup parce que ces formes n'ont pas subi le meme genre de déclin qu'en Inde. Les termes “danse indienne” doivent ainsi couvrir des danses qu'on trouve sur des terres témoignant d'un héritage culturel indien. Ces terres, qui à cet égard peuvent être appelées la “Grande Inde”, forment une grande partie du sud-est asiatique.

La “danse indienne” n'inclut pas toutes les danses en Asie du Sud-Est. C'est dans la cour et le temple qu'il faut regarder. Le corpus de danses tribales et folkloriques n'est d'aucun intérêt. Dans l'Asie du Sud-Est continentale, le Cambodge a été un important centre de danse indienne. Dans l'archipel indonésien, Java et Bali sont les deux principales îles où le caractère indien est le plus fort, quoique pas de manière égale dans toutes les danses. On peut voir une certaine influence indienne sur beaucoup de danses qui ne sont pas de temple et sur de nombreuses danses folkloriques à Sumatra et dans d'autres îles de l'archipel. Normalement, ces danses ne seront pas considérées comme “danse indienne”.

On devrait garder à l'esprit que même les danses de cour et de temple de Java et Bali montrent souvent une influence des danses tribales et folkloriques. Quand cette influence est forte, l'aspect indien est souvent limité aux positions des mains, au costume et à l'histoire représentée. Mais les gestes ne sont pas de nature indienne. Dans ce cas, nous ne pouvons pas parler de danse indienne, seulement d'influence indienne sur la danse.

On devrait aussi retenir qu'il n'y a pas de frontière nette entre danse indienne et d'autres danses d'Inde et d'Asie du Sud-Est. Des styles de danse influencent d'autres danses et il y a des formes mélangées. La danse indienne est la mieux définie non pas par telle et telle danse ou telle et telle région, mais par des caractéristiques spécifiques, principalement esthétiques.

Nous aurions pu choisir d'autres termes, tels que “danse de type indien”, “danse sacrée indienne” ou “danse hindoue”. Nous aurions pu employer le pluriel “danses”. Toutes ces alternatives peuvent s'utiliser indifféremment.

 

 À propos du site… Date de cette page : 17 SEP 2005